Le projet a été financé par le Conseil national de recherches du Canada (CNR), une première collaboration entre celui-ci et le YNLC, et coordonné par Douglas Joe, de la Première Nation de White River au Yukon. Tina Jules, directrice du YNLC, est très fière de voir le projet concrétisé, après des retards dans la livraison des vidéos occasionnés par la pandémie.
Selon Tina Jules, Skaayda.û en Tinglit, les retombées de ce projet dépassent déjà largement les attentes : «Cela a été une opportunité de préserver nos langues, de les protéger et d’inclure la technologie dans le processus. C’était aussi une formidable occasion de rassembler les personnes plus vieilles et les jeunes générations ensemble.»
Sur ce point, Paul Caesar est catégorique : cela a été une expérience unique. Ce dernier a été un des quatorze stagiaires à avoir reçu une formation pour réaliser le projet dans sa communauté, la Première Nation de Liard.
Les ainé.e.s ont des histoires à raconter, sur eux et sur leurs peuples, et il y a toute cette connaissance qui peut être transmise grâce à cela. Je crois que ça m’a aussi permis d’élargir ma perspective sur les traditions orales.
Il ajoute qu’il a aussi pu développer des habiletés en captation et en montage vidéo.
Derrière tous les bénéfices, le plus important pour Tina Jules reste la possibilité de reconnecter avec sa culture. La revitalisation des langues autochtones, selon elle, est inséparable de «la façon dont on bâtit notre confiance en soi et notre sentiment d’appartenance. En apprenant nos langues, on apprend tellement sur nous-mêmes!»
Les 72 vidéos sont désormais publiées sur YouTube et sur le site Web du YNLC. «Maintenant, on peut s’en servir à des fins éducatives et continuer à améliorer la connaissance des langues», se réjouit Tina Jules.
Aviver la créativité
Selon Tina Jules, il est clair que ce projet pourra stimuler la création d’autres initiatives de revitalisation et de préservation des langues autochtones. «Nous avons déjà quatre stagiaires qui ont décidé de poursuivre la création de nouvelles vidéos», affirme-t-elle avec fierté. Paul Caesar est d’ailleurs en train d’ajouter des sous-titres en anglais sur les conversations, pour permettre au grand public de se familiariser avec le Kaska.

Le YNLC ne manque pas d’idées pour s’assurer de fournir un espace réconfortant pour que les ainé.e.s puissent se confier, s’ouvrir ou simplement avoir une conversation dans leur langue natale.
Nous sommes en train de développer un studio au cœur des locaux du YNLC pour que les Premières Nations qui souhaitent venir prendre la parole puissent le faire le plus facilement possible.
L’important, pour le centre et sa directrice, c’est de favoriser les moments d’échanges : «Que ce soit des discours, des présentations, des histoires, des prières ou juste des conversations normales, c’est intéressant. Nous avons une génération d’ainé.e.s qui est la dernière à être réellement élevée dans leurs langues. Si certains se sont éloignés de leur langue lorsqu’ils sont allés dans des pensionnats, ils ne l’ont pas perdue. Elle a seulement été enfouie au plus profond d’eux, en raison des traumas», explique Tina Jules.
Tirer profit du projet de loi C-91
La Loi sur les langues autochtones, visant la préservation, la protection et la revitalisation des langues autochtones, a reçu sa sanction royale le 21 juin 2019. Près de deux ans plus tard, le gouvernement fédéral et les Premières Nations sont toujours en consultation pour la mise en œuvre du financement.
Pour l’instant, il n’y a donc pas eu de véritable changement pour les projets du YNLC. «Mais c’est définitivement quelque chose qu’on suit de près, qui pourrait assurer un financement continu.»
Si c’est le cas, les retombées de la loi pourraient contribuer à réaliser le souhait de Paul Caesar : «Que jamais plus nos langues autochtones ne nous soient enlevées.»