«La récente découverte du pensionnat de Kamloops nous a rappelé que le Canada reste un pays qui a construit ses fondations sur l’effacement et le génocide des nations autochtones, y compris des enfants», peut-on lire sur le site web du mouvement Idle No More – Jamais plus l’inaction, le mouvement de contestation des Premières Nations du Canada.
«Nous refusons de rester les bras croisés alors que l’histoire violente du Canada est célébrée. Nous appelons une fois de plus les protecteurs de la terre, de l’eau et du ciel autochtones et leurs alliés à se rassembler et à perturber la célébration.»
Des dizaines de marches, de rassemblements, et de célébrations contestataires sont organisées un peu partout à travers le pays, de la Colombie-Britannique au Nouveau-Brunswick. Certaines municipalités ont simplement choisi d’abandonner complètement les célébrations traditionnelles en solidarité avec les communautés autochtones en deuil, comme c’est le cas à Saint-Jean et Fredericton, au Nouveau-Brunswick.
À Ottawa, le départ de la marche symbolique, organisée par la nation Anishinaabe, se fera des bureaux de Services aux Autochtones Canada, situés au 10 rue Wellington, à Gatineau, et elle prendra fin sur la colline parlementaire.
Pour la marche qualifiée «d’anticolonialiste» qui se déroulera beau temps, mauvais temps, les gens sont invités à se vêtir d’orange, à apporter des tambours et des objets qui font du bruit, ainsi que des affiches et banderoles où on peut y lire les mots-clics #CancelCanadaDay #NoPrideInGenocide #215 #JusticeForIndigenous.
Les réseaux sociaux s’enflamment
Sur Facebook, Twitter et Instagram, la popularité du mot-clic #CancelCanadaDay s’accentue d’heure en heure. Plusieurs personnalités publiques autochtones et gens de tous les horizons invitent aussi au boycottage des célébrations de la fête du Canada via les réseaux sociaux.
«Voici mon message pour le Canada à l’occasion de la fête du Canada. Je ne vais pas la célébrer avec des piqueniques et des feux d’artifice. Je vais passer la journée à réfléchir, à me souvenir de tout ce que nous avons perdu et de la façon d’aller de l’avant. Je vous demande de faire de même», a écrit sur Twitter le député ontarien du district de Kiiwetinoong, Sol Mamakwa, membre de la Première Nation de Kingfishner Lake.
Le gouvernement réagit
«C’est vraiment une question pour beaucoup de Canadiens. Pour moi, je pense que c’est important d’avoir des réflexions», a souligné la ministre fédérale des infrastructures et des collectivités, Catherine McKenna, lorsque questionnée sur le sujet lors d’un point de presse lundi. Je ne pense pas que beaucoup de gens veulent célébrer [la fête du Canada], confiait-elle.
Peut-être qu’on pourrait réfléchir sur le travail que nous devons accomplir avec les Autochtones. Parce que nous n’y sommes pas encore. Nous devons le reconnaitre. Je pense que c’est un temps très difficile pour les peuples autochtones au pays […] il y a des enfants qui sont morts dans des écoles résidentielles, et maintenant les Canadiens veulent savoir aussi.»
La ministre et députée d’Ottawa-Centre qui rencontrait les médias pour faire le point sur son avenir politique estime qu’il reste encore beaucoup de travail à faire avant la réconciliation.
Par courriel, le ministre du Patrimoine canadien, Steven Guilbeault, a reconnu que la fête du Canada n’est pas une occasion de réjouissances pour plusieurs personnes.
«Les Canadiennes et les Canadiens ont eu le cœur brisé en apprenant la découverte de dépouilles d’enfants sur les sites d’anciens pensionnats autochtones au Canada. Les communautés autochtones de tout le pays traversent en ce moment une période particulièrement douloureuse et traumatisante», a-t-il déclaré, en soulignant que le gouvernement du Canada continue de travailler avec ses partenaires autochtones pour leur fournir des ressources et du soutien.
«La façon dont les Canadiens et Canadiennes choisissent de célébrer la fête du Canada leur est propre, et peut être aussi diversifiée que notre population. Nous invitons tout le monde à profiter de cette occasion pour en apprendre davantage sur les luttes et les perspectives des autres, et pour réfléchir et honorer le fait que l’histoire et l’identité du Canada ont été façonnées par les Premières Nations, les Inuits et les Métis.»
Vives réactions de l’opposition
De son côté, le chef conservateur, Erin O’Toole, estime plutôt que les célébrations de la fête du Canada ne devraient pas être annulées. En soutenant que les conservateurs sont déterminés à renouveler les relations avec les nations autochtones, il a indiqué s’opposer fermement à la «culture d’annulation» de militants, en particulier pour le jour de la fête nationale.
Selon lui, les tragiques découvertes des dernières semaines devraient plutôt être utilisées comme un moyen de motivation pour construire un Canada meilleur.
«Cela nous rend un mauvais service lorsque nous ignorons l’injustice, les mauvaises parties de notre histoire et l’héritage en cours, et l’impact de ces choses horribles qui se sont produites et continuent de se produire», a indiqué pour sa part, le chef néodémocrate, Jagmeet Singh, alors que, selon lui, les gens verront la fête du Canada différemment cette année.