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le Lundi 20 septembre 2021 14:35 Éducation

Admissions scolaires aux Territoires du Nord-Ouest : cinq familles perdent en cours d’appel

L’école Allain St-Cyr de Yellowknife est l’une des deux écoles de la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest (CSFTNO). — Archives L'Aquilon
L’école Allain St-Cyr de Yellowknife est l’une des deux écoles de la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest (CSFTNO).
Archives L'Aquilon
IJL L’AQUILON (Territoires du Nord-Ouest) – La Commission scolaire francophone des TNO n’exclut pas de porter la cause devant la Cour suprême du Canada. De son côté, la première ministre dit prôner la collaboration et plus de flexibilité dans le processus d’admission.
Admissions scolaires aux Territoires du Nord-Ouest : cinq familles perdent en cours d’appel
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La cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest vient de trancher en faveur du GTNO, dans une cause impliquant la Commission scolaire francophone des TNO (CSFTNO) et cinq familles non-ayants droit, dont les demandes d’admission aux écoles francophones du territoire avaient été refusées en 2019. L’une de ces familles en était à sa troisième révision judiciaire.

Les trois juges de la cour d’appel ont ainsi cassé la décision du juge de la Cour suprême des TNO, Paul Rouleau, rendue en 2020. Ce dernier avait donné gain de cause aux parents et rejeté les principaux arguments mis de l’avant par la ministre de l’Éducation alors en place — et actuelle première ministre —, Caroline Cochrane, pour justifier le rejet de ces six demandes d’admission.

Un premier jugement, rendu en 2019, avait donné gain de cause à la première famille qui se présentait devant les tribunaux.

En aout dernier, les trois juges de la cour d’appel ont porté un tout autre éclairage sur la situation en validant la décision de la ministre qui, selon eux, s’est acquittée en toute légitimité de son pouvoir discrétionnaire de refuser l’admission de ces six élèves.

«[Les décisions du juge Rouleau] sont entachées d’erreurs de droit», peut-on lire dans le jugement, qui inclut plusieurs critiques. «Lorsqu’on les examine en contexte avec les motifs sous-jacents, aucune des décisions de la ministre dans ces cas particuliers n’était déraisonnable».

Les enfants concernés par ces demandes de révision ne satisfont pas aux critères d’admission aux écoles francophones prévus par la loi canadienne, et ils n’entrent pas non plus dans l’une des trois catégories prévues dans la directive ministérielle des TNO sur les inscriptions. Les familles hors critère peuvent alors demander au ministre de l’Éducation d’exercer un pouvoir discrétionnaire pour accepter une admission d’exception.

De nouveaux droits

La règle en cause a toutefois été abrogée en 2020 par le GTNO en faveur de la CSFTNO, qui bénéficie désormais d’un plus grand pouvoir de décision quant aux admissions d’élèves qui ne satisfont pas aux critères d’admission. Par exemple, la commission scolaire peut désormais choisir d’inscrire un enfant de parent francophile et compétent en français, même si ce parent n’est pas citoyen canadien et qu’il n’a pas reçu son instruction primaire au pays.

Bien que ce jugement de la cour d’appel concerne une directive ministérielle qui n’est plus en vigueur, la CSFTNO ne tient rien pour acquis.

Nous étions heureux d’avoir réussi à travailler en collaboration et négocier de bonne foi avec le ministre de l’Éducation afin d’en arriver à ce nouveau règlement. Nous l’avons toujours dit, ce règlement est beaucoup mieux qu’il l’était. Or, il n’est pas parfait.

— Simon Cloutier, président de la CSFTNO

«Même si ce jugement concerne la précédente directive ministérielle qui n’est plus en vigueur, il est important pour nous de faire une analyse juridique de cette décision, pour nous assurer que cette décision ne viendra pas nous hanter dans le futur avec un nouveau ministre ou une nouvelle approche politique du GTNO qui pourrait nous faire reculer», explique-t-il.

Le GTNO souhaite collaborer

Invitée à commenter le jugement de la cour d’appel, Caroline Cochrane assure que le GTNO travaillera en partenariat avec la CSFTNO.

«J’apprécie que la cour d’appel ait apporté plus de clarté et de validation quant à cette décision. Il y a eu des changements aux règlements sous le gouvernement actuel. Il est important que nous protégions l’intégrité de la communauté francophone et que nous accordions plus de flexibilité dans le processus d’admission», a-t-elle affirmé à Médias ténois.

«Je crois qu’en allant de l’avant, il est primordial de travailler en partenariat», ajoute-t-elle.

Nous ne devrions pas agir en adversaires, nous avons besoin de travailler ensemble. La priorité est de fournir une éducation à nos enfants, et de préserver les langues. C’est sur quoi nous devrons nous concentrer à l’avenir.

— Caroline Cochrane, Première ministre des Territoires du Nord-Ouest et ancienne ministre de l'Éducation

Dans un communiqué de presse paru le 13 septembre, le ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation, R. J. Simpson, dit souhaiter «collaborer avec la CSFTNO afin d’envisager les prochaines étapes appropriées pour atténuer les répercussions potentielles sur l’éducation des élèves et des familles concernés. J’apprécie la certitude et la clarté accrues que procure la récente décision de la Cour d’appel, ajoute-t-il. À l’avenir, je continuerai à me concentrer sur le renouvèlement de la relation avec la CSFTNO en ce qui concerne l’admission des enfants de parents [non-ayants droit] dans les écoles francophones des TNO». Le ministre a décliné la demande d’entrevue de Médias ténois.

La cause en Cour suprême?

La CSFTNO a maintenant la possibilité de faire appel au jugement de la cour d’appel et de demander à la Cour suprême du Canada d’entendre cette cause.

«Nous sommes en train d’évaluer toutes nos possibilités, tout en continuant de collaborer avec le ministre de l’Éducation pour définir les prochaines étapes, explique le président de la CSFTNO. Y aura-t-il moyen de nous entendre avec le gouvernement pour ne pas aller en Cour suprême? Nos conseillers juridiques vont nous présenter tous les effets possibles de ce jugement sur le futur de nos écoles.»

Archives L'Aquilon

«Il est certain que nous sommes déçus. Nous croyons que le juge Rouleau avait bien fait son travail, non seulement en évaluant le droit et l’article 23 [de la Charte canadienne des droits et libertés], mais également en allant un peu plus loin en évaluant la cause et l’esprit même de l’article 23», déplore Simon Cloutier.

Ce dernier ajoute :

C’est malheureusement fréquent avec la cour d’appel, qui n’évalue pas nécessairement des cas, mais qui évalue le droit. C’est une tendance au pays : quelqu’un gagne en première instance et perd en cours d’appel.

— Simon Cloutier, président de la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest

Selon M. Cloutier, il aurait pu en être autrement si l’un des trois juges de la cour d’appel avait été francophone : «Malgré le fait que je ne doute pas de la capacité des juges, il reste qu’aucun juge francophone n’était disponible pour entendre la cause. Je comprends que le droit reste le droit, mais je crois qu’un juge francophone vivant en situation minoritaire aurait probablement été mieux disposé à comprendre les arguments avancés.»

Depuis l’établissement de la directive ministérielle de 2016, régissant les décisions du ministre quant à l’admission d’élèves de parents non-ayant droit, 26 de ces élèves ont été admis aux écoles francophones des TNO.

«Si on se fie aux dernières données, la population des écoles francophones de Yellowknife et de Hay River est présentement en décroissance, souligne Simon Cloutier. Il est important pour nous d’assurer la vitalité de nos écoles, et par le fait même, la vitalité des communautés francophones des TNO.»

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